FB Procédés fête ses 30 ans! – Patrick Dupré
Pendant 25 ans, Patrick Dupré a laissé beaucoup de choses de côté pour se consacrer pleinement au développement de FB Procédés. Dans son rôle de dirigeant de société, il s’était fixé un cap et n’avait qu’un seul leitmotiv : la satisfaction du client en proposant des produits de qualité. Un vrai passionné qui savait passer avec un plaisir non dissimulé du « costume-cravate », pour convaincre des acheteurs ou ingénieurs sur les avantages de nos dégrilleurs, au « bleu de travail » et monter un sprinkler ou dépanner un dégrilleur sur site. Rencontre avec un personnage clé, qui a laissé les rênes de FB Procédés à son fils Guillaume en 2015.
Bonjour Patrick. FB Procédés va fêter ces jours-ci ses 30 ans. Depuis 1991, la société a avantageusement évolué et s’est faite un nom dans le milieu de l’assainissement. Qu’est-ce que cela t’inspire ?
Avec le recul, j’aime à dire que les choses se sont faites comme un puzzle. A un moment donné, tous les morceaux se sont rassemblés pour démarrer cette société, à partir d’un produit génial.
La réussite, elle est avant tout collective. J’ai eu la chance de trouver les bonnes personnes très rapidement pour être bien accompagné.
Ensuite, avoir eu l’opportunité de faire des salons. J’en ai dépensé de l’énergie à organiser, participer et faire fructifier les contacts obtenus. Le premier, dès fin 1992 (Pollutec Paris), en louant avec un de nos voisins nantais la moitié d’un stand. Nous n’avions pas de machines sur le stand. J’avais, un peu en catastrophe, réalisé une cassette vidéo et imprimé quelques photos. Nous avions un gros visuel « dégrilleurs automatiques verticaux » et un petit « FB Procédés ». A l’époque, nous n’étions que très peu connus. Cela a fortement contribué à faire décoller notre activité.
Et enfin l’idée de créer un dégrilleur, en 1996-1997, qui soit un peu plus standard que ceux présents à l’époque dans notre gamme. Un petit dégrilleur susceptible de répondre à un maximum de besoins. Nous avons donc créé le SG400.
Tu es donc arrivé chez FB Procédés en 1991. Raconte-nous comment cela s’est passé ?
En 1989, je travaillais chez WORTHINGTON Batignolles, fabricant de pompes industrielles. Elle avait perdu près de 30% de ses employés et cela n’allait pas fort. On parlait de délocalisation, de chômage, de licenciements. A l’époque, je jouais au rugby au SNUC et je savais que Fernand Barré, que je connaissais d’un précédent travail, habitait entre chez moi et le stade. Et puis un soir, en sortant d’un entraînement, je croise sa femme et elle m’annonce qu’il s’est lancé seul à concevoir et vendre ses propres dégrilleurs.
Ensuite, la situation de WORTHINGTON ne s’est pas améliorée et en 1990, j’ai revu plusieurs fois Fernand entretemps.
Et il t’a donc proposé de le rejoindre ?…
En effet, j’étais alors en reconversion professionnelle. Il faisait un dégrilleur par mois. Je me rappelle de sa pile de dossiers qui représentait 4 ans d’activité. Il travaillait chez lui et il y avait sa planche à dessin, des punaises, des cartons pour simuler les mouvements du dégrilleur, sa cabane de jardin où il faisait des essais de basculement. Et il me dit : j’aimerais que quelqu’un reprenne. On s’est dit que je pouvais faire quelque chose. Face aux technologies concurrentes, il m’avait bien expliqué être persuadé qu’il y avait quelque chose à faire. Il y avait un marché.
Dans ce laps de temps, à chaque fois que j’ai eu une touche sérieuse pour un emploi, il y a toujours eu un événement qui a fait que je n’ai pas été pris. Avec le recul, je me dis que le destin m’a guidé vers ce que j’étais destiné.
Et ?…
De fil en aiguille, en 1990, pendant l’été de mémoire, je lui ai donné mon accord. Par contre, dans le cadre de ma fin de mission chez WORTHINGTON, je devais aller au Mans pour la transmission du savoir-faire pendant deux mois. Je suis même resté deux mois de plus car les deux mois initiaux prévus étaient trop justes. D’ailleurs, ils m’avaient proposé deux autres postes mais j’avais déjà donné mon accord à Fernand.
Lors du plan social, pour tous les créateurs ou repreneurs d’entreprise, il y avait une prime, des bilans professionnels et des formations. J’ai donc eu une formation pour apprendre à diriger une société. Pendant 3 mois, j’y ai appris énormément de choses.
Ton aventure chez FB Procédés commençait donc…
C’est exact. On bossait chez Fernand dans un pièce où il y avait une planche à dessin et un bureau. Et lorsque l’on recevait quelqu’un, un fournisseur ou autres, nous allions au café d’à côté. On a décidé de lancer la société le 1er octobre 1991.
Fernand est redevenu salarié et moi gérant minoritaire. Je m’occupais de la tenue comptable, je faisais les devis et il fallait aussi que j’apprenne parfaitement le dimensionnement et le fonctionnement des dégrilleurs. Pour les devis, j’avais acheté une machine à écrire IBM à boule. Un outil extraordinaire qui nous a servi de longues années. Cela nous a permis de sortir des documents de qualité pour l’époque. Nous avions le souci du détail et je pense que c’est un des points qui nous a fait devenir ce que nous sommes aujourd’hui.
Tu prends donc la décision d’accompagner Fernand pendant deux ans jusqu’à son départ en retraite et ensuite de lui succéder. Mais explique-nous comment vous vous êtes rencontrés ?
Depuis ma sortie de l’école avec mon DUT mécanique en poche, j’avais fait quelques petits boulots et stages. En 1977, ma femme travaillait comme secrétaire de direction dans une boite qui louait des bureaux à des sociétés, en offrant des services de télex, de photocopies, accueil, choses qui coûtaient cher à l’époque. Et parmi ces sociétés, il y en avait une avec des mecs très sympas qui s’appelait la SNEP, spécialisée dans les stations d’épuration. Ils cherchaient un dessinateur. Le responsable du BE était un certain Fernand Barré. Je me suis présenté et ils m’ont embauché. A la fin, je répondais aux AO en proposant deux solutions : boues activées et lit bactérien et on avait deux jours pour monter notre dossier. Le boulot était passionnant et j’étais content chaque lundi d’attaquer la semaine. La SNEP a finalement déposé le bilan en juin 1980.
Sentant le vent venir, j’avais commencé à chercher un autre boulot et j’ai répondu à une annonce comme agent de méthode qui était mon cœur de métier. Et j’ai été embauché. J’ai commencé le 1er juillet chez WORTHINGTON Batignolles. Je m’occupais de la réparation des pompes, des devis, des prix, etc.
Tu avais une appétence avérée pour tout ce qui touchait à la technique ?
Oui. Tout jeune, je bricolais des vélos ou Solex. Sur ce dernier, je m’amusais à démonter le moteur, le décalaminer, je faisais mes premières armes en mécanique. J’avais également hérité de mon père d’un beau jeu de mécano qui datait de la 2éme guerre. Une approche des assemblages boulonnés, cela a l’air de rien mais quand t’as jamais touché un boulon de ta vie, ce n’est pas juste en regardant que l’on comprend les choses parfois. Cela m’a permis d’utiliser des petits moteurs, de construire des choses.
Sinon, un peu plus tard, pendant les vacances scolaires, j’ai travaillé dans un atelier mécanique de poids lourds. Je baignais dans ce monde de mécanique.
J’ai eu le bac et le permis à 18-19 ans. J’ai choisi un cursus d’études courtes et opté pour un DUT mécanique.
En arrivant chez FB Procédés, et en participant à des salons, tu as dû aussi développer ta fibre commerciale…
C’est vrai mais à la fin de ma scolarité, j’avais fait un petit boulot qui m’avait éveillé sur ce point. J’étais un peu timide, réservé. Je me suis retrouvé à vendre des cartes postales à Paris. J’étais un très mauvais vendeur. Je ne vendais que 7-8 paquets dans la journée, pendant que mes chefs d’équipe pouvaient en vendre jusqu’à 40 en une ½ journée. Ils avaient un charisme et un bagou extraordinaires. Je n’avais pas le tempérament pour vendre n’importe quoi à n’importe qui. Ce n’est pas mon truc, contrairement à ce que l’on peut attendre d’un vrai commercial. Et puis, le patron a eu l’idée de créer une agence à Nantes et il a proposé à mes deux chefs d’équipe de manager cette agence. J’en ai eu connaissance, je leur ai proposé de les accompagner en leur suggérant de m’apprendre le boulot pour être à mon tour chef d’équipe.
Nous sommes donc arrivés à Nantes. Ils m’ont appris à baratiner et à recruter. En recrutant vendeurs et vendeuses, j’ai d’ailleurs rencontré celle qui allait devenir ma femme.
Cela a été une vraie expérience. En étant chef d’équipe, je me suis éclaté et épanoui.
Comment se sont passées tes premières années chez FB Procédés ?
Lorsque j’ai commencé avec FB Procédés, tous les voyants étaient au vert et tout s’est fait naturellement.
Un point que je me suis toujours attaché à défendre, c’est l’importance et le respect du client en interne. Le client n’est pas roi, mais il est la richesse de l’entreprise. Je pense aussi que l’image du dégrilleur automatique a changé dans le courant des années 90 en partie grâce à notre technologie. A l’époque, beaucoup de nos confrères proposaient des modèles bien plus compliqués.
En 1993, le départ de Fernand a été un moment important dans la vie de la société car il a fallu lui trouver un remplaçant. Un choix fondamental pour une jeune société.
Complètement. J’ai pensé à plusieurs connaissances mais cela s’est soldé par des refus. Parmi eux, Jean-Paul Planchot, qui rejoindra finalement notre équipe plus tard en 1998. Mais il m’a rappelé en me précisant qu’il avait peut-être quelqu’un correspondant au poste et il me dit : c’est le fils de Fernand Lobréau, celui que tu as remplacé chez WORTHINGTON. Le monde est petit.
J’ai donc rencontré le grand Robert, qui venait d’être licencié. Nous nous sommes entendus et il a fait quelques semaines aux côtés de Fernand. Il était super motivé, et il avait même réalisé une maquette de NI13 avec un mécano alors qu’il venait d’arriver. C’était remarquable.
Robert Lobréau, Claude Martin, Fernand Barré et Patrick Dupré
Comme l’affirmait Fernand Barré, la pelote commerciale a donc grandi au fil des mois, en même temps que les dégrilleurs FB Procédés donnaient satisfaction.
La réussite, c’est aussi une histoire de rencontres. C’est par exemple un certain Monsieur Rives qui nous a fait rentrer à la Compagnie Générale des Eaux autour de Rennes. C’est le dégrilleur qui était le meilleur commercial grâce au « bouche à oreille ». Les gens avaient des besoins et commençaient à nous appeler, connaissant notre matériel. Petit à petit, c’est comme ça que nous sommes rentrés chez les constructeurs de STEP parce que certains exploitants ont commencé à manifester leur préférence pour nos dégrilleurs. Je ne me suis jamais précipité à faire de grandes actions commerciales et j’ai laissé faire le temps. Pourquoi aller plus vite que la musique ? On progressait doucement.
L’évolution d’une société passe généralement par des prises de risques, des évolutions techniques ou des affaires qui font franchir des caps. Est-ce qu’il y a des souvenirs qui te viennent à l’esprit sur le sujet ?
Quelle que soit la demande du client, je n’ai jamais eu le sentiment de prendre des risques. C’est une question d’état d’esprit. J’en ai sans doute pris mais cela faisait partie d’une grande évidence. Avec l’expérience acquise précédemment, c’est comme un sixième sens. On sent les choses ou pas. Lorsque je décidais d’une évolution technique par exemple, je savais que j’avais raison. Ce qui bousculait parfois les habitudes dans notre manière de fonctionner, mais je sentais que c’était indispensable. Par exemple, je percevais, je pense, assez bien pour la conception d’un dégrilleur la limite entre la fragilité, la solidité et le superflu. C’est l’aboutissement de la pratique du terrain. Je peux vous dire que lorsque l’on passe de nombreuses heures dans le fond d’un canal à redresser des barreaux, c’est une bonne expérience et on apprend vite. Mieux, on sait immédiatement ce que l’on ne doit plus faire.
Au début, vu que nous étions deux ou trois, nous nous déplacions régulièrement sur site pour diverses raisons. J’ai emmené Robert sur de belles galères parfois. Comme celle d’agrandir les trous sur les 3 sprinklers d’Annecy. Tout ça pour entendre dire quelques semaines plus tard de la bouche de l’exploitant : « Monsieur Dupré, c’est bien ce que vous avez fait, cela améliore le rendement, mais ce n’était pas forcément utile ». Mais bon, c’était mon côté puriste, sur des machines qui ont été un bon laboratoire pour la suite.
La conception et le lancement du SG400 font partie des caps importants. Il a démarré doucement, avec une conception un peu trop simple, trop légère et nous l’avons optimisé. On a par ailleurs augmenté sa longueur maxi pour répondre aux besoins de client.
Il y a eu aussi le dégrilleur de Livery à La Baule. Il avait fallu faire jouer les bras de levier et les poids. On a alourdi le poids du chariot en haut, et c’est devenu standard.
Autre étape, à mettre sur le compte de Claude Martin. On essayait un dégrilleur pour un salon d’un mètre de large à l’atelier. La forme du support de mobile faisait que cela provoquait trop de bruit à l’ouverture de la mâchoire. Il me dit : « cette pièce-là ne pourrait pas être arrondie au lieu d’être droite ? ». Bingo, c’est devenu un standard.
Tu parlais de bonnes personnes avec lesquelles tu t’étais entouré précédemment, et dans ce sens, votre duo avec Robert a réellement boosté et porté la société pendant vingt ans.
Nous étions complémentaires avec Robert. Lui, plutôt enclin à ne pas réinventer le monde à chaque affaire et donc prôner la standardisation au maximum. Et moi plutôt à essayer d’optimiser chaque machine et de la personnaliser.
Cela nous a permis d’évoluer et de repousser nos limites en partant d’une largeur de dégrilleur de 500mm, puis 800mm, 1000mm, 1500mm et enfin 2000mm. Je pense avoir sans doute été agaçant parfois à être pointilleux sur la réalisation de certains dégrilleurs parce que pour moi, c’était fondamental. En tant que deviseur, j’étais aussi concepteur par le fait car j’étais confronté à de nouveaux challenges et derrière, il fallait que ça suive au niveau des gammes, des profils utilisés, des épaisseurs de tôles… Nous avons formé un beau duo et nous avons réussi à diversifier le matériel.